Avenue Arnold Delvaux : une approche collaborative pour une rénovation réussie

Une joyeuse fête de quartier s’est déroulée sous un soleil radieux le dimanche 8 mai 2022 avenue Arnold Delvaux, fermée à la circulation pour l’occasion, en présence des habitants, de nombreux enfants, de l’échevin des Travaux Publics, de l’échevine de l’Environnement et des Espaces Verts, et d’employés du service de l’Urbanisme de la Commune.

Au menu : resserrer les liens entre voisins et avec la commune, en partageant un barbecue bien de saison autour d’un verre de l’amitié.

L’objet des réjouissances ? Nous y fêtions la fin des travaux de rénovation de notre avenue, étalés sur 7 mois, couronnement d’une coopération réussie entre les habitants et les services communaux initiée dès la fin de 2018. C’était aussi l’occasion de se remémorer, sans amertume mais avec fierté, le très long trajet (combat ?) parcouru par les habitants depuis exactement 10 ans, habitants qui se sont mobilisés pour être entendus quant à leur volonté de respecter la typicité, la sécurité et l’environnement de leur avenue.

Un bel exemple de coopération entre la Commune et les habitants

La rénovation d’une avenue est un projet bien plus complexe qu’il n’y paraît. De très nombreux paramètres doivent être pris en compte, qu’ils soient, entre autres, d’ordre juridique (largeur des trottoirs, largeur de la voie carrossable, respect du RRU, respect du Règlement des Bâtisses d’Uccle de 1948, respect des normes pompiers, normes d’éclairage, etc), d’ordre architecturaux (choix des revêtements des trottoirs, écoulements des eaux, parcours piétons et vélos, etc), ou d’ordre environnementaux (préservation ou remplacement des arbres, essences, nombre d’arbres, etc).

La tentation est donc grande pour l’autorité communale ou régionale d’”imposer” une vision d’une rénovation d’avenue sans expliquer et dialoguer avec les habitants.

Nous avons eu la chance de pouvoir mettre en place ce dialogue de manière très constructive entre les services communaux des travaux publics et de l’environnement d’une part, et les habitants d’autre part, via le comité de soutien de l’avenue A. Delvaux, agissant comme une courroie de transmission entre les parties.

Il s’agissait en effet de comprendre les paramètres expliqués ci-dessus, de recevoir les explications et contraintes de la Commune, de les expliquer aux habitants, de discuter des alternatives pour chacun de ces paramètres avec la Commune, et de ‘sonder’ l’opinion des habitants par de nombreux sondages pour dégager des majorités pour chacun des choix et pour les communiquer à la Commune.

Comprendre, Expliquer, Choisir, Argumenter, Sonder … telle a été la démarche utilisée dans un excellent esprit d’écoute et de collaboration avec la Commune, pour essayer de maximiser les résultats de l’équation présentée ci-dessus.

Une question de compromis

Mais quels ont donc été les sujets susceptibles de choix permettant aux habitants de donner leurs avis sans impacter l’enveloppe budgétaire attribuée au projet et en respectant les contraintes juridiques, architecturales et environnementales ?

Ils sont de plusieurs ordres :

  • La préservation du nombre d’arbres : depuis le début du projet, les habitants se sont opposés à la volonté de la Commune de ne préserver que 50% des arbres de l’avenue (soit 22 sur 44), et de dès lors modifier drastiquement la typicité de l’avenue ; le nombre d’arbres a été maintenu dans le projet final ;
  • L’essence des arbres : vu qu’une analyse phytosanitaire a confirmé que les robiniers faux acacias âgés d’une soixantaine d’années devaient être abattus, la Commune et les habitants ont décidé (via un sondage) de les remplacer par une alternance d’arbres fruitiers (des poiriers callery) et d’érables champêtres, et de placer des charmes multi-troncs à l’entrée et à la sortie de l’avenue. Cette alternance apporte de nombreux avantages en termes de coloris, de biodiversité, de feuillages, etc ;
  • Une légère réduction de la largeur des trottoirs avec un placement différent des nouveaux arbres permet d’élargir la voirie de la chaussée et y indiquer un passage clair et sécurisé pour les vélos tout en plaçant des arceaux de stationnement vélos et en rendant ces trottoirs bien plus agréables ;
  • Le choix du type de luminaires parmi ceux proposés par Sibelga ; le choix de la majorité des habitants s’est porté sur des luminaires caractéristiques [Valentino] qui se réfèrent au type de luminaires initialement placés dans les années 20 du siècle dernier.

A noter que la Commune a décidé, pour la première fois lors d’une rénovation d’avenue, et malgré l’opposition des habitants, d’appliquer à la lettre une règle datant du « règlement des bâtisses de 1948 » interdisant le stationnement des voitures devant les maisons, en zone de recul, sauf si c’est devant un garage. De nombreux habitants de l’avenue ont donc « perdu » leur emplacement de parking (bordures hautes, bollards, etc). Cette règle sera dorénavant appliquée lors des futures rénovations d’avenues à Uccle.

Un long engagement citoyen
Ces trois dernières années ont donc été très constructives et ont permis de débloquer un dossier initié il y a exactement … 10 ans. En effet, le dialogue des ces trois dernières années n’a malheureusement pas pu être mis en place par les différentes parties depuis 2011, date des premières études autour de la rénovation de l’avenue. De nombreuses actions ont dû être entreprises par les habitants pour faire entendre leurs avis. Le court rappel historique repris dans l’encadré énumère les étapes et les efforts qui ont été nécessaires pour persévérer dans ce dossier.

Qu’en retenir ? Cette saga montre qu’avec de la patience, du temps, de l’engagement, du dialogue, de la ténacité et de la participation citoyenne active, il est possible d’influencer son environnement immédiat. Comme le disait l’échevin des travaux publics en 2014 : « La rue appartient aussi à ses habitants  », et l’implication citoyenne porte ses fruits quand les conditions de dialogue sont présentes. Nous espérons que cet article inspirera d’autres habitants.

Le comité de soutien Arnold Delvaux : Joost, Philippe, Nadine, Dominique, Victor, Olivier
Plus d’info ? Contactez-nous à defensedelvaux@yahoo.com


Rappel de l’historique du dossier

La commune de Uccle a introduit un plan pour la reconstruction de l’avenue Delvaux en 2011 contre lesquels les habitants se sont immédiatement opposés parce qu’il affecterait le caractère résidentiel de l’avenue de par la réduction drastique du nombre d’arbres et l’élargissement de la chaussée au détriment des trottoirs. Cela a donné lieu à une première pétition en octobre 2011.

En juin 2013, la Commune propose un nouveau plan de restructuration qui sera mis à l’enquête publique en février 2014, pour passage en commission de concertation le 13 mars 2014. Ce projet confirme la réduction de moitié du nombre d’arbres (de 40 à 20) et la mise en place de bandes de stationnement des deux côtés de la voie, un rétrécissement des trottoirs et un élargissement de la chaussée.

Le comité de soutien Arnold Delvaux organise une deuxième pétition auprès des riverains qui se prononcent à 93% contre les plans communaux. Cette pétition est remise à la commission de concertation du 13 mars 2014, en présence de plus de 50 habitants de l’avenue. La Commune décide cependant de donner un AVIS FAVORABLE, en indiquant néanmoins que les contre-propositions faites par les habitants pourraient être « examinées ».

Les habitants prennent contact avec Urban.Brussels pour attirer l’attention sur le décalage entre la volonté des habitants et les plans communaux, et décident de se faire assister par un avocat. Urban.Brussels refuse alors en janvier 2015 l’octroi du permis à la commune d’Uccle qui a proposé des plans légèrement modifiés, mais la commune d’Uccle décide en février 2015 de faire appel de cette décision !
En juillet 2015, le ministre président de la Région Bruxelloise rejette l’appel de la commune d’Uccle et refuse une seconde fois d’octroyer le permis d’urbanisme, mais le Conseil communal d’Uccle décide encore une fois de faire appel de cette décision en introduisant cette fois un recours au Conseil d’Etat ! Les habitants se constituent « partie intervenante ».

Les habitants soumettent une troisième pétition au service des travaux publics de la Commune, rassemblant 97% d’avis favorable, pour remettre en état les trottoirs de notre avenue qui se détériorent et sont devenus dangereux. La Commune n’y répond pas.

Enfin, en février 2019, le Conseil d’Etat décide que le recours de la commune d’Uccle est irrecevable, mettant un arrêt définitif à la demande de permis de rénovation de l’avenue Arnold Delvaux par la commune d’Uccle, et ouvrant la porte à une autre approche.