« IL ETAIT UNE FOIS LE MOINEAU DOMESTIQUE »

Tel aurait pu être le titre d’une fable de Jean de Lafontaine.
Mais qui se soucie vraiment de ce petit oiseau, ami fidèle de nos anciens, qui côtoyait jadis les rues et jardins de nos villes et villages... ?

Pourtant, comme le faisait remarquer Alain Paquet,
ornithologue chez Natagora, lors d’une conférence donnée le 17 avril 2023 à la Maison communale, à l’initiative de l’Echevine de l’Environnement, c’est l’une des espèces qui est le plus en déclin dans nos pays européens. Dans la Région de Bruxelles-Capitale, « Les Moineaux domestiques ont dramatiquement régressé (près de 95% depuis 1992, selon le programme de Suivi des Oiseaux Communs par points d’écoute) et notre Commune d’Uccle ne fait pas exception ».
Pourquoi y a-t-il, aujourd’hui, une prise de conscience de la part de bon nombre de citoyens, quant à l’avenir de cet oiseau ?
C’est tout simplement que le Moineau domestique est l’une des richesses de la biodiversité en ville et un bien commun. Et il est la preuve vivante d’une diminution importante de la qualité environnementale de notre milieu de vie.
Depuis le néolithique, il est le compagnon de l’homme. Il l’a accompagné sur tous les continents, ayant besoin de lui pour y trouver sa nourriture et les endroits de nidification. Ce fut le cas notamment à Bruxelles, où il était très présent dans le passé. De nos jours, la présence du moineau est de moins en moins importante et décline de façon accélérée depuis à peu près vingt ans.

Anne, habitante de la rue Henri Van Zuylen, se souvient de son jardin des années 1950, il y a 73 ans…
« … Une bande de 4 à 12 moineaux se trouve généralement dans le jardin ‘cour avant’ de ma maison ou en face, dans le rosier. Lorsque le voisin a taillé ce rosier, il y a un an ou deux, ils sont tous arrivés chez moi. Ils fréquentent spécialement le houx déplumé,
juste à côté de la maison de mon voisin, et le cyprès doré. »

« Selon moi, dit-elle, l’un des principaux facteurs du déclin des moineaux est la disparition des chevaux de trait. Dans les années 1950, ils étaient au moins cinq à sillonner journellement le quartier : deux de la boulangerie chaussée d’Alsemberg, juste en face de la rue Van Zuylen, un de la boulangerie du Globe, un de l’Union économique, et un des Glacières de Bruxelles. »
« Les moineaux se posaient tranquillement au milieu des rues puisqu’il ne passait que cinq ou six voitures par jour, et ils cherchaient les restes intéressants dans le crottin. Ma voisine d’en face jetait au milieu de la rue, chaque jour à 12h30, une pomme de terre écrasée (reste de son repas) en les appelant. Tous arrivaient. »

Quel plaisir que ce petit moment d’histoire !

Aujourd’hui, nombre d’habitants semblent avoir compris l’importance de la préservation de cette espèce d’oiseau dont Natagora a effectué un recensement.

Alain Paquet nous en dit ceci :

« A Uccle, le Moineau domestique s’est retiré des quartiers résidentiels du sud de la commune dans les années 1990. Dans la décennie suivante, il a disparu de la majeure partie nord et centre, à l’exception du quartier Saint-Job et d’un petit noyau relictuel au bord de l’extinction à la rue Lincoln. Il se maintient assez bien à l’ouest, où il y subsiste en nombre suffisant de la place Jean Vander Elst jusqu’au Keyenbempt. Il est difficile de dire si la tendance à la régression s’est poursuivie dans les années 2017-2021. »

Actuellement, la population nicheuse totale de Uccle est d’environ 220 à 240 couples. Ils nichent dans des cavités du bâti, en petits groupes, compo- sés de 5 à 30 couples, vivent dans les buissons,et se nourrissent d’insectes et de graines.

Les ‘méta-colonies’ les plus importantes sont par ordre décroissant :
1. ‘Stalle–Alsemberg sud’ : 115-130 couples, le plus gros noyau de population
2. ‘Sud’ : 45-50 couples
3. ‘Centre’ (Saint-Job) : 40 couples
4. ‘Coghen nord’ : 12 couples
5. ‘Nord-est’ : 5 couples

Le 20 juin 2022, l’asbl Oxy 15/Oxydurable avait organisé une conférence sur la préservation du Moineau domestique, avec l’aide de l’ornithologue Eric Etienne. Des visites ont eu lieu chez les habitants. Des conseils ont été prodigués sur le meilleur emplacement des nichoirs, sur la végé- talisation dans les jardins et l’espace public (40 plantes ont été répertoriées par des spécialistes).

Des nichoirs ont été donnés gratuitement aux participants.

Un premier pas vers une sensibilisation auprès des habitants. La période de nidification a lieu de mars à mai. Déjà des petits « propriétaires » ont pris place dans les nichoirs, et les haies font retentir le chants des moineaux venus s’installer dans le quartier.

Il existe maintenant une asbl « Moineaux et Biodiversité » qui anime les « Groupes moineaux citoyens » des différentes communes de Bruxelles. Et, nous l’espérons, une cartographie des lieux de nidification dans tout Bruxelles verra bientôt le jour.
Toute personne intéressée par cette action peut prendre contact avec Nelly, par mail à l’adresse francenel46@gmail.com ou par téléphone au 0478.39.18.95.
Des nichoirs sont mis à disposition gratuitement de ceux qui le désirent.
L’action « MOINEAUX » ne fait que commencer…

Xavier Retailleau

30 avril 2024