L’AVENUE DU PRINCE DE LIGNE QUEL BILAN ?

Article paru dans la Lettre aux Habitants n°73, septembre 2012.

Il faudrait des pages pour résumer, même sommairement,
les procédures visant à l’urbanisation de cette
artère qui joint la chaussée de Waterloo à la place St
Job.

N’en retenons que l’essentiel.

Rappelons d’abord qu’il s’agit d’un terrain de 9 ha,
long mais très étroit, surtout quand on se rapproche
de la place du Vivier d’Oie, et qui jouxte la ligne n° 26
du chemin de fer sur la partie non bâtie de l’avenue
du Prince de Ligne. De l’autre côté du chemin de fer,
l’avenue Latérale n’est bâtie, elle aussi, que d’un
côté.

Depuis bien longtemps, ces 9 ha qui appartenaient à
la SNCB sont utilisés comme jardins potagers par des
riverains, à l’exception d’un parking public de
90 places près de la place St Job et d’un autre de
16 places près du Vivier d’Oie.

En 2002, la Commune d’Uccle a voulu réglementer
l’avenir de cette langue de terre et a mis en route la
procédure d’un Plan Particulier d’Affectation du Sol
(le PPAS n° 63). Si on oublie la création d’une « placette
 » en intérieur d’îlot envisagée au-dessus de la
voie ferrée peu avant qu’elle ne pénètre sous la forêt
de Soignes – projet qui a reçu un avis heureusement
négatif de la commission de concertation - les intentions
de la Commune étaient « la préservation du caractère
résidentiel aéré du quartier (avec des gabarits
limités) et le développement possible du noyau du
Vivier d’Oie en tant que pôle de déplacements intermodal
 » (extrait de l’article de Chantal de Laveleye,
alors échevine de l’urbanisme, dans leWolvendael de
décembre 2004.)

Les remarques de la commission de concertation du
27/10/2004 étant importantes, un nouveau projet de
PPAS a été mis à enquête publique en 2006. Il a
abouti à un PPAS voté par le Conseil communal le
13/7/2006, mais l’administration régionale l’a mis
dans un tiroir … où il est toujours, sans explication
officielle …

Donc, pas de plan règlementant ce qu’on peut
construire et par conséquent terrain de chasse rêvé
pour les promoteurs. En fait, déjà en 2004, la société
Soficom avait acheté le terrain de la SNCB. Elle a déposé
une demande de permis d’urbanisme en 2009 ;
il était excessif et éloigné de l’esprit du PPAS ; il a reçu
un avis négatif de la commission de concertation le
4/3/2009.
Une demande modifiée a été introduite en 2011 ; le
22/6/2011 elle a reçu un avis favorable mais assorti
d’un certain nombre de conditions. Soficom ayant
modifié son projet, une nouvelle enquête publique
a eu lieu qui a abouti, le 13/6/2012, à un avis à nouveau
favorable de la commission, sous certaines
conditions ne nécessitant pas une nouvelle enquête.

Telle est la situation, fin août 2012. Il appartient
maintenant à l’administration régionale (au « fonctionnaire
délégué ») de prendre position, soit en refusant
la délivrance du permis (c’est un avis
contraignant, qui lie la Commune), soit en l’autorisant
(ce qui laisse encore une certaine latitude à la
Commune pour la délivrance du permis.)

Si la construction se réalise, ce sont 4 immeubles comportant
55 appartements + 5 maisons qui remplaceront
les potagers et le parking communal.

Le propos n’est pas ici de porter un jugement sur le
projet immobilier, de dire s’il est heureux ou néfaste,
s’il est acceptable ou non pour les riverains. Ce serait
de toute façon hasardeux avant de l’avoir vu réalisé.
Certes, pour les riverains, ce sera un coup dur : une
perte évidente au point de vue paysager même s’il
reste de la verdure, des nuisances en termes de circulation
automobile, de parking, de bruit… ; bref
une moins-value pour leurs habitations.

C’est l’éternel conflit entre les « urbanistes » et les
« environnementaux ». En l’espèce il ne faut pas oublier
que la zone est constructible et qu’il est nécessaire,
à Uccle comme ailleurs, de prévoir de nouveaux
logements pour une population en augmentation,
surtout à côté d’un noeud intermodal. Ce qui ne veut
pas dire qu’il faut pour cela éliminer la nature !

On peut quand même se poser quelques questions :

  • Est-il sage de construire aussi près d’une voie de
    chemin de fer ? Le nombre de trains RER va heureusement
    augmenter et il y a maintenant – enfin – une halte au Vivier d’Oie. Les nouveaux habitants
    seront à quelques mètres et encaisseront le bruit.
    Les habitants de l’avenue Latérale ne seront pas
    épargnés non plus. Le promoteur a assuré que le
    bruit sera absorbé par le matériau de construction.
    On demande à le croire, mais que se passera-t-il si
    ce n’est pas suffisant ?
  • Ne peut-on craindre qu’en imperméabilisant environ
    50% de ce grand terrain, on s’expose à des
    inondations ? Certes, la commission de concertation a entendu les riverains et a ordonné certaines
    mesures qui vont dans la bonne voie, mais est-ce
    assez ? Il s’agit d’un fond de vallée et on ne cesse
    d’imperméabiliser le sol par de nouvelles constructions
    dans toute la vallée de St Job ; au plateau
    Avijl, environ 200 logements sont prévus. Le bassin
    d’orage sous la place St Job suffira-t-il ? A-t-on une
    politique d’ensemble ? L’administration répond
    bien sûr par l’affirmative ; mais en cas de nouvelles
    graves inondations dans cette vallée, qui va s’en
    sentir responsable ? Personne ?
  • N’est-ce pas au point intermodal que constitue le
    Vivier d’Oie qu’il faut prévoir beaucoup de parking
     ? Le petit parking tout proche acquis par la Commune
    ne pourra accueillir que 20 voitures, en plus
    des quelques rares places disponibles place du Vivier
    d’Oie. Près de la place St Job, la Commune va
    devoir remplacer le parking existant par un autre à
    aménager à l’arrière des dernières maisons de la
    chaussée de St Job, mais il sera plus petit (60 places
    contre 90), moins facile d’accès et très dérangeant
    pour ceux qui auront le nez dessus. On peut prédire
    que d’ici peu on regrettera de n’avoir pas réservé
    la place nécessaire aux navetteurs qui
    voudront prendre le RER. Mais bien sûr, pour la
    Commune, construire du logement (qui n’est pas
    social !) rapporte plus qu’un parking …
  • Même si le PPAS 63 est sans valeur juridique, il reflète
    ce que la Commune entendait comme « bon
    aménagement des lieux ».
    En particulier, il prévoyait
    moins de construction dans le souci de maintenir
    plus d’espace vert et de parking. Il est
    regrettable qu’on ne s’oriente pas plus dans cette
    direction. Un simple projet communal d’urbanisme
    peut influencer la décision de l’autorité chargée de
    statuer sur une demande de permis.
    Même si c’est tardif, on peut regretter que la Commune
    n’ait pas songé à un tout autre usage, partiellement
    en tout cas, de la zone (mais encore moins
    rentable…) : construire une dalle de béton au-dessus
    de la voie ferrée, ce qui aurait permis du parking, des
    terrains de jeux, etc…et cela aurait rapproché les habitants
    actuellement séparés par le chemin de fer.

Quoi qu’il en soit, on ne peut que se réjouir de
constater combien les habitants concernés se sont
mobilisés, et ce depuis le début. Sans nymbisme ni
excès. Et en nouant entre eux des liens qui dépassent
ceux du simple voisinage.

Denys Ryelandt