Article paru dans la Lettre aux Habitant n°72, juin 2012.
photo ci-dessus : Les problèmes de congestion dans le Bois de la Cambre sont également le fruit d’un manque évident de gestion de l’espace public. Ainsi, le stationnement informel et improvisé sur l’avenue de Diane fausse en grande partie la perception du problème. On l’oublie trop souvent : De nombreux navetteurs (travaillant avenue Louise notamment), des riverains et des visiteurs considèrent, de manière un peu trop cavalière, le bois comme un parking géant. (photo : Google)
La polémique liée à la fermeture partielle du Bois de la Cambre est révélatrice d’une problématique bien plus complexe que le sujet tel que répercuté récemment par de nombreux politiques.
Il est en effet bon de rappeler que les difficultés en matière de mobilité résultent avant tout d’une inadéquation des interrelations entre les offres de transport, les localisations de l’habitat et la répartition spatiale des activités. Faire passer les voitures à gauche plutôt qu’à droite d’un bois, constitue en terme de flux automobiles une question relativement secondaire qui peut par contre être véritablement bénéfique pour la convivialité et l’écosystème d’une telle zone verte emblématique.
Il convient cependant d’accompagner un tel projet de mesures très volontaristes et efficaces en faveur du transport collectif et de l’inter-modalité. Sans quoi la modification du plan de circulation à l’intérieur du Bois de la Cambre n’aura pour effet que de reporter plus en amont les encombrement actuels.
Ainsi il est essentiel de renforcer largement les liaisons de transports collectifs autant dans le sens radial (entre la périphérie et l’hyper-centre) que dans le sens transversal (liaisons entre les noyaux périphériques eux-mêmes) en vue d’offrir enfin aux navetteurs une alternative efficace au déplacement individuel.
1. L’axe radiant (de la périphérie vers l’hyper-centre bruxellois).
Il est déplorable de constater à quel point, du côté d’Uccle, l’axe "périphérie<>centre-ville" est sous exploité en matière de dessertes collectives. Seuls des bus de De Lijn et des TEC parcourent la chaussée de Waterloo à destination du centre ville. La STIB n’y propose quasi aucun service ! Par ailleurs, les bus circulant sur cette chaussée sont systématiquement englués dans la circulation. La priorité devrait de toute urgence leur être accordée par un ensemble d’aménagements urbains (priorité aux carrefours, etc.) dont éventuellement la déviation partielle de certaines lignes via le bois de la Cambre. Les voiries que le Plan communal de Mobilité de Bruxelles prévoit d’y fermer à la circulation automobile pourraient utilement accueillir le passage d’un bus voire même l’établissement d’une ligne de tram (non polluant pour le bois). Cette idée, qui semblera iconoclaste à certains, est cependant envisageable, moyennant des conditions strictes d’utilisation (vitesse limitée, véhicules non polluants, site propre bien délimité par rapport à la circulation des piétons et cyclistes…)
2. L’importance des rocades !
Force est de constater le sous-développement des lignes de rocade. Celles-ci sont pourtant essentielles . Ainsi la jonction entre Ixelles et Uccle demeure très mauvaise. Les lignes existantes de la STIB (tram 7, bus 38 et 41) sont peu efficaces et l’offre SNCB sur la ligne 26 est inexistante en soirée et le week-end ! Renforcer l’offre de train sur cette ligne est essentiel : telle une rocade régionale circulant sous le bois de la Cambre, elle constitue une alternative efficace au métro. Elle permet de relier rapidement Uccle au quartier Schumann. Rappelons que notre asbl, ainsi que le commune d’Uccle, insiste également depuis longtemps pour la création d’un nouvel arrêt le long de la ligne 26 à la hauteur du Lycée Français et du futur lotissement Engeland (300 logements).
En marge de cette ligne de chemin de fer, Il est tout aussi urgent de créer un connexion transversale (bus ou tram) efficace entre le centre d’Uccle et les campus universitaires du Solbosch et de la Plaine. La traversée du bois de la Cambre mérite à ce titre d’être également envisagée. Une fois de plus, les voiries du bois de la Cambre qui seront fermées à la circulation automobile pourraient servir partiellement à établir cette connexion.
Même si le transport individuel et motorisé peut indéniablement être vu comme une source d’émancipation, force est de constater qu’il conduit à des problèmes plus importants que ceux qu’il espère résoudre. C’est d’ailleurs pourquoi les vrais coûts économiques, sociaux et environnementaux en sont souvent niés, sous estimés et mal maitrisés. L’engorgement du Bois de la Cambre et la controverse qui s’en suit, est un bel exemple qui témoigne à quel point cette logique de déplacement et de comportement individualiste a aujourd’hui atteint ses limites.
Il est urgent de s’orienter vers un mobilité durable, moins consommatrice d’espace, moins polluante et plus respectueuse de l’environnement et du milieu urbain dans lequel nous vivons.
La ville de Bruxelles se donne un large délai de 15 ans pour mettre son plan en œuvre. Osons espérer que ces quinze années suffiront pour accompagner le plan de mesures efficaces en faveur du transport collectif.
Photo ci-dessus : Vers 1900 c’était déjà le "bazar" en matière de circulation à l’entrée du Bois. Cependant le partage de l’espace public entre les différents modes de déplacement était bien plus équilibré. Par ailleurs le Bois constituait un objectif de promenade en soi et non pas juste un axe de transit permettant de relier plus rapidement l’hyper-centre à la périphérie.