Aujourd’hui que se profile la possibilité que ce site vert
exceptionnel bénéficie d’une procédure de classement
qui permettrait de le sauver, il n’est pas inutile de rappeler
l’historique du combat mené depuis les années 1970
par les habitants du quartier de Saint-Job, qui se sont
battus sans relâche contre les projets successifs d’urbanisation
du plateau Avijl, projets qui auraient abouti à
la destruction du quartier historique et au saccage d’un
des derniers sites verts à caractère rural de la ville. Cette
lutte, initialement menée par le Comité de Protection
et de Rénovation de la Montagne de Saint-Job, a fortement
contribué à forger une conscience citoyenne.
Au début des années 2000, les voisins immédiats du
plateau ont été rejoints dans leur lutte par de nombreux
habitants de toute l’agglomération, regroupés dans
l’Association Protection et Avenir d’Avijl.
Pendant toutes ces années, l’action citoyenne a empêché
la mise en oeuvre des plans de construction et a
amené les pouvoirs publics à mieux prendre en considération
la nécessité de préserver au mieux ce patrimoine
naturel. Jusqu’en 2002, le PPAS (plan particulier
d’affectation du sol) en vigueur (28bis) prévoyait encore
la construction de 312 logements. En 2003, les autorités
communales ont entrepris de réviser ce PPAS en réduisant
le nombre de logements à environ 200, en vue
notamment de moins empiéter sur les espaces verts.
D’emblée, l’Association s’est proposée de collaborer
étroitement avec les autorités communales en vue
d’aboutir à un projet qui réponde de manière harmonieuse
à leurs préoccupations et à celles des habitants.
Dans cette optique, nous avons élaboré un Livre Blanc
qui recensait de manière très précise les sites pouvant
faire l’objet d’une urbanisation sans porter atteinte au
cœur du plateau. Un premier projet de révision du PPAS
a cependant été finalisé sans tenir le moindre compte
de nos remarques et suggestions, et mis à l’enquête
publique au printemps 2007. Devant les nombreuses
objections (à commencer par celles émises lors d’une
réunion de la Commission de concertation le 19 avril
2007 par M. Armand De Decker, bourgmestre empêché),
ce premier projet a été abandonné et une nouvelle
étude a été initiée par les autorités communales au mois
de juin 2007.
Dès le 28 juin, l’Association demandait,
dans une lettre adressée à l’ensemble des conseillers
communaux, qu’un véritable dialogue soit d’emblée
entamé avec les habitants, afin d’éviter de déboucher
sur un nouveau blocage.
Dans les mois qui ont suivi, nous avons effectivement
eu de nombreuses réunions avec le bourgmestre, avec
l’échevin en charge du dossier et avec des membres de
l’administration communale. Nous avons toujours été
très courtoisement écoutés.
Écoutés, mais jamais entendus.
A plusieurs reprises, nous avons demandé avec insistance
à pouvoir collaborer directement avec le bureau
d’architecture chargé par la Commune de l’élaboration
du PPAS, de manière à être effectivement associés à la
préparation du plan ; cela nous a toujours été refusé.
Le projet de révision du PPAS soumis à l’enquête publique
en janvier-février 2009 comportait indubitablement
des améliorations par rapport à la version
précédente. Il était cependant loin de répondre aux
attentes des habitants, qui se sont mobilisés en masse
en envoyant 1.500 lettres (du jamais vu !), et en assistant
en masse le 18 février (environ 400 personnes, qui
avaient dû prendre congé de leur travail) à la réunion
de la Commission de concertation. Aucune de leurs
observations et suggestions, écrites et verbales, n’a été
prise en considération, et le PPAS 28ter, prévoyant la
construction d’environ 200 logements, a été approuvé
successivement par les autorités communales et le gouvernement
de la Région.
Devant cette menace, deux procédures ont alors été engagées,
à l’initiative de l’Association, en vue de préserver
le plateau. D’une part, une demande de classement
en zone verte a été introduite par l’asbl Bruxelles Nature
auprès du gouvernement de la Région de Bruxelles-
Capitale en mai 2009. D’autre part, une requête en
annulation du PPAS 28ter a été introduite par plusieurs
riverains au Conseil d’Etat le 19 avril 2010.
Le 14 septembre 2012, le Conseil d’Etat a annulé une
des dispositions du PPAS, qui aurait de facto permis
l’élargissement de la voirie (Montagne de Saint-Job)
contournant la zone verte englobant le terrain de
basket. Il a malheureusement validé les autres dispositions
(il faut rappeler que le Conseil d’Etat ne prend en
considération que les aspects juridiques des dossiers et
ne statue pas sur le fond).
Le 29 novembre 2012, le dernier Conseil communal de
la législature après les élections d’octobre, a approuvé,
quasi à la sauvette et sans enquête publique, une modification,
“pour cause d’utilité publique” du PPAS 55
Saint-Job/Benaets, parcelle constructible appartenant à
la Commune, située chaussée de Saint-Job (en face du
magasin Sequoia). Outre l’aménagement d’un bassin
d’orages, le PPAS 55 ainsi modifié prévoit l’extension de
la zone de parkings en lieu et place d’une cinquantaine
de logements prévus par le plan. Nous avions pourtant
insisté, au fil des années, pour que soit étudiée l’option
d’y construire un nombre significatif de logements,
soulageant d’autant la pression sur le plateau Avijl.
En effet, un premier examen de la situation des lieux
donnait à penser qu’il serait possible d’y implanter des
constructions de telle manière qu’elles bénéficient d’un
ensoleillement correct tout en se trouvant à distance du
charroi de la chaussée, et en préservant la possibilité
d’y aménager un nombre significatif d’emplacements
de parkings.
Le 15 octobre 2013, l’échevin Marc Cools en charge
du dossier a fait connaître, au cours d’une réunion
publique d’information, sa décision d’entamer très
rapidement une première phase de construction de plusieurs
dizaines de logements au haut de la Montagne
de Saint-Job. Le périmètre concerné englobe une zone
de garages délabrés (que nous avons évidemment toujours
considérée comme constructible), mais il pénètre
également profondément dans le cœur vert du plateau.
Sa mise en œuvre constituerait une première atteinte
grave au site. L’échevin a également annoncé que la
Commune et Hydrobru prévoyaient la construction à
brève échéance d’un tunnel de collecte des eaux provenant
de la Vieille rue du Moulin et de l’avenue Dolez, à
destination du nouveau bassin d’orage prévu chaussée
de Saint-Job. Le chantier de construction de ce tunnel
serait installé à l’intérieur du plateau, à proximité immédiate
du mur classé qui le sépare du fond de la rue
Vandernoot, dans une des prairies figurant en zone
verte du PPAS 28ter. Ainsi, il serait d’emblée porté atteinte
aux zones vertes soi-disant protégées par ce PPAS,
sans garantie véritable d’une remise en l’état après la
fin du chantier. Or il serait techniquement possible de
construire ce tunnel sans empiéter sur le plateau.
Enfin, le 13 février 2014, le Gouvernement de la Région
de Bruxelles-Capitale a décidé, sur avis favorable de la
Commission royale des Monuments et des Sites de la
Région, d’ouvrir la procédure de classement d’une zone
du plateau englobant la plus grande partie de la zone
d’espace vert du PPAS 28ter. Les détails de cette procédure
et ses conséquences sont explicités en détail dans
ce même numéro dans l’article Vers la sauvegarde du
plateau Avijl ? On peut raisonnablement espérer que
cette avancée facilitera la sauvegarde du coeur du plateau.
Mais, plus que jamais, il nous faut rester vigilants
et attentifs à tout nouveau développement.
Pour le Bureau de l’Association Protection et Avenir
d’Avijl,
Stéphane Davidts, Président