MIGRATION DES BATRACIENS, PEUT-ON ESPÉRER LA RÉALISATION DE CRAPAUDUCS RUE ENGELAND À UCCLE ?
Il y a peu, on pensait que les migrations de
grenouilles et crapauds ne concernaient pas
les Ucclois. Depuis de nombreuses années, les
médias nous montraient les bénévoles participant
à l’aide à la traversée des batraciens à Boitsfort où
Daniel Geerinkx et Mario Ninanne coordonnent les
traversées av. Charles Albert et drève de la Louve,
en bordure de la forêt de Soignes.
On croyait ces traversées périlleuses disparues
à jamais d’Uccle. Heureusement les mesures de
conservation de la nature commencent à porter
leurs fruits et permettent la reconstitution des populations.
Les amphibiens (batraciens), se nourrissant
d’insectes, de vers, etc., se situent en haut
de la chaîne alimentaire et ont fortement souffert
de l’utilisation des pesticides au point d’être en
fort déclin. La diminution de l’usage des pesticides
– l’abandon par la commune d’Uccle, mais
pas par tous les particuliers – a permis une lente
reconstitution des populations. A cette cause, il
faut ajouter des raisons connexes, comme la pollution
des eaux, l’assèchement des mares et... les
voitures, toutes des causes anthropiques. Si les
humains sont ainsi à l’origine de leur raréfaction,
ils sont aussi capables de concourir à leur protection
et au rétablissement des populations
L’augmentation des populations d’amphibiens
dans les environs du Kinsendael et du Papenkasteel
est donc une bonne nouvelle pour la biodiversité
et la preuve de l’efficacité des mesures
prises.
Mais elle a pour conséquence que les batraciens
sont de plus en plus nombreux à vouloir traverser
la rue Engeland en bordure du Papenkasteel. En
effet, les amphibiens, crapauds (principalement)
et grenouilles adultes, reviennent à leur lieu de
naissance où mâles et femelles reproducteurs se
donnent rendez-vous à la saison des amours car
la rencontre entre partenaires a toujours lieu dans
leur environnement natal.
S’ils étaient nombreux jusque dans les années
septante, ils n’étaient plus que quelques-uns à
effectuer cette migration au début du vingt et
unième siècle. A ce moment, des palissades de
bois empêchaient l’entrée, comme la sortie des
batraciens. Mais depuis deux - trois ans, les traversées
sont en augmentation et aujourd’hui, ils
sont plus d’une centaine à traverser la route. En
2014, une riveraine a observé quelques batraciens
écrasés, et en a aidé quelques-uns à faire la traversée.
En 2015 elle a contacté Pierre Lambelin, président
de la régionale bruxelloise de Natagora, qui a fait
suivre cette information aux Ucclois. C’est ainsi
que Hellin de Wavrin, Ucclois et spécialiste des
amphibiens, est intervenu les soirs suivant pour
venir au secours des batraciens et les protéger
des roues des automobiles. Entretemps, en une
soirée, cette riveraine a sauvé une centaine de
batraciens. La traversée des amphibiens, qui a
l’avantage d’être groupée et se limiter à quelques
jours, a reçu l’aide de ces bénévoles, ce qui a
réduit les égarements dans des bouches d’égout
et l’écrasement par les automobiles.
Notre ami des batraciens a aussi relevé les difficultés
rencontrées pour leur traversée, tant à
l’aller qu’au retour : le danger des voitures, les
bordures trop hautes, les taques d’égouts dans
lesquelles tomber.
Le retour vers les lieux ou vivent et se nourrissent
crapauds, tritons et grenouilles s’étale sur plusieurs
jours, sans parler du départ des jeunes nés
dans l’étang à la fin de l’été, de sorte que l’action
des bénévoles pour les retours est pratiquement
impossible. La hauteur des trottoirs constitue
alors un obstacle insurmontable pour les tout
jeunes amphibiens lorsqu’ils retournent au Kinsendael…
Entretemps, la Commune ne reste pas
les bras ballants !
Les services communaux de l’environnement ont
positivement réagi à la demande des naturalistes
et ont placé des panneaux avertisseurs dans les
deux sens et aménagé des plans inclinés à plusieurs
endroits afin de permettre un retour sain et
sauf de nos jeunes batraciens.
Et au printemps 2016 ? Quand faut-il être
prêt à intervenir ?
Le début de la période de migration est liée à la
température : 7° c. est le signal déclencheur de
la migration. En dessous de cette température, ou
lorsque la température baisse sous cette valeur,
vous pouvez rester au chaud. L’autre élément
important est l’humidité : les batraciens respirant
partiellement par la peau apprécient les soirées
pluvieuses. Un début de printemps, de la bruine
et une température supérieure à 7° c. sont une
véritable invitation à la migration : les batraciens
sortent en masse pour se rendre sur leur lieu de
naissance et y retrouver les meilleures conditions
pour se reproduire.
Cela peut se limiter à deux ou trois nuits si le
temps est doux. Mais c’est alors la cohue…
Les premières heures de la soirée sont les heures
de pointe et la migration s’éteint déjà avant
minuit. Nul besoin de passer une nuit blanche à
transférer des batraciens.
Il résulte qu’on ne peut programmer cette opération
à l’avance et qu’il faut se tenir prêt dès que
les conditions de température et d’humidité sont
remplies. La période de migration s’étale sur
un long intervalle qui commence en mars et se
termine habituellement en avril, avec parfois des
interruptions, des reprises, voire des prolongations.
Ce qui fait qu’une telle opération, visant à faire
traverser grenouilles et crapauds lors de leur migration
printanière, est une organisation lourde et
qui demande des disponibilités. Si l’enthousiasme
est généralement présent les premières années, il
s’atténue avec le temps.
Des crapauducs pour permettre les
allers-retours
Heureusement des solutions pérennes sont
envisageables : la réalisation de crapauducs,
par exemple. Les crapauducs sont des tunnels
qui permettent le passage des amphibiens sous
la voirie. C’est une solution permanente qui évite
la mobilisation annuelle des « passeurs de crapauds
».
Des crapauducs sous la rue Engeland permettraient
d’assurer un nouveau corridor écologique
là où la migration annuelle est périlleuse, voire
mortelle ; ils participent donc au remaillage écologique
de la vallée de Saint-Job.
Certains modèles s’intègrent plus facilement dans
la voirie existante et ne sont pas aussi encombrants
… comme le montrent ces tunnels français
(image du fabricant : http://www.aco.fr)
On peut même disposer des bacs à leur entrée afin
d’effectuer un comptage précis des amphibiens
les empruntant. Ils sont ouverts la nuit lors de la
période de migration, et le matin, un comptage
suivi de leur lâchage a lieu.
Voici l’avis d’un expert : « D’après la configuration
des lieux, trois crapauducs seraient utiles. Les
tunnels devraient partir d’un côté du Kinsendael,
côté intérieur de la clôture où le sol est en contrebas.
Ils passeraient sous la promenade verte, la
rue Engeland, puis le trottoir longeant la propriété
du Papenkasteel. Ils déboucheraient dans celle-ci
facilement puisque le sol y est aussi en contrebas. Il
faut également penser aux « barrières » temporaires
qui guideraient les batraciens vers les tunnels.
Elles seraient sécurisées contre le vandalisme ou
les accidents puisque d’un côté situées à l’intérieur
de la clôture du Kinsendael et de l’autre de celle du
Papenkasteel. »
La commune d’Uccle a entrepris un vaste chantier,
avec de multiples projets dans la vallée du
Geleytsbeek afin de recréer une vraie vallée, avec
son ruisseau et des zones humides.
Notre espoir est que la commune d’Uccle, en collaboration
avec Bruxelles Environnement puisse
réaliser ces aménagements à l’occasion d’autres
travaux de voirie. Puisse cette réalisation de crapauducs
s’inscrire dans ce cadre.
Quelques recommandations pour manipuler
les animaux si vous voulez aider à
la migration des batraciens :
La peau des batraciens (amphibiens) est un organe
fragile qui doit rester constamment humide
car elle leur permet de respirer, surtout lors de
l’hibernation. Les gants de jardin, assez raides,
peuvent abîmer leur peau fine et délicate. Il est
recommandé de les manipuler à mains nues et
humides. Des gants en latex ou des gants pour
la vaisselle, préalablement humidifiés peuvent
protéger les mains sensibles. Les batraciens étant
des animaux à sang froid, leur manipulation doit
être la plus courte possible pour éviter que la chaleur
corporelle du sauveteur ne les réchauffe. Les
habitués ne craignent pas de prendre les crapauds
à mains nues, mais prévoient un bidon d’eau pour
se rincer régulièrement les mains et les nettoyer
du venin provenant de leur peau. Les grenouilles
peuvent elles se manipuler sans risque.
Les tritons sont des animaux plus fragiles que les
crapauds et grenouilles. Pour les capturer, il est
recommandé de passer les doigts sous leur ventre,
et le pouce sur le dos, tout en faisant attention à
ne pas les comprimer. Ainsi, un triton souffrira
de piétinement, voire d’écrasement lorsqu’il se
trouve mêlé aux grenouilles et crapauds, dans le
même seau.
Bénévoles bienvenus…
Si vous voulez apporter une aide aux batraciens
ou participer à une équipe de bénévoles, SOS
Kauwberg – Uccla Natura se proposer de rassembler
les personnes intéressées et de les mettre
ensuite en relation
Vous pouvez écrire à SOS Kauwberg – Uccla Natura
rue Geleytsbeek, 29 à 1180 Uccle, ou envoyer un
courriel à Kauwberg@skynet.be . Veuillez laisser
une adresse de courriel ou un numéro de GSM afin
de vous recontacter.
Marc De Brouwer