UN GROS PROJET AU DIEWEG N° 57

UNE DEMANDE NECESSITANT DES DEROGATIONS… SANS ENQUÊTE PUBLIQUE !

Il existait une petite école primaire bien cachée (« Les Blés d’Or ») dans un écrin de verdure au- quel on accède, à hauteur du n° 57 du Dieweg, par un chemin privé. Fin 2022, l’école est partie pour le parvis Chantecler.

Le 23 janvier 2023, un voisin a fortuitement appris qu’une demande de permis d’urbanisme avait été introduite pour effectuer des travaux d’une certaine importance, dont notamment :
• transformer et agrandir la villa de 1929 (qui abritait l’école depuis plus de 60 ans) pour y établir 3 appartements + construire 2 maisons,
• abattre une dizaine d’arbres autour des cours de récréation de l’école

Le problème vient de ce que cette parcelle fait partie d’un Plan Particulier d’Affectation du Sol (le PPAS 29 bis) qui contient des prescriptions spécifiques qui vont être violées, alors qu’aucune enquête publique n’est prévue …

En effet, à y regarder de près, ce PPAS protège l’alignement des tilleuls en palissade sur 80 mètres de ce chemin privé, ainsi que sa section pavée qui fait partie du patrimoine historique du quartier. De part et d’autre de l’entrée de l’école, au bas de ce chemin en forte pente (jusqu’à 19 %), deux magnifiques chênes rouges d’Amérique (de 3,50 m. de circonférence et de 25 m. de haut) sont aussi inscrits sur cette liste des sites à sauvegar- der du PPAS.

La zone de protection des arbres, instaurée pour préserver la flore et la faune au centre de l’îlot, a été spécialement étendue pour englober ces deux chênes ainsi que les autres arbres en bordure de la section pavée. Dans toute cette zone, il est interdit :
• d’effectuer tous travaux de terrassement, de construction, de creusement de puits et, de manière générale, tous travaux de nature à modifier l’aspect du terrain ou de la végétation ;
• de déverser dans le sous-sol, par puits perdu, toute substance de nature à altérer la pureté des eaux, et par là influencer la composition de la faune et de la flore ;
• d’abattre ou d’endommager les arbres.

Par ailleurs, « Les plantations existantes en dehors des emprises des constructions doivent être conservées. »

Qu’à cela ne tienne : le 24 janvier dernier, la Commune d’Uccle a déclaré que le dossier était complet et ne nécessitait aucune demande de dérogation, aucune mesure de publicité et aucun avis préalable de la Commission Royale des Monuments et Sites.
Or, ce programme immobilier a été optimisé sans se soucier de la préservation du patrimoine architectural existant ou de son environnement remarquable et protégé par le PPAS :

A l’entrée de l’école, des dalles de béton végétalisé sont prévues jusqu’à la base du chêne rouge d’Amérique pour y accueillir 4 des 6 places de parking du projet ; comme si ceci n’allait pas mettre cet arbre en danger…

Se pose aussi la question de l’augmentation du trafic automobile, liée au choix de poursuivre un programme de cinq logements ; jusqu’à présent, seuls le gardien et la directrice pouvaient emprunter ce chemin privé.

La gestion des eaux usées est prévue de manière inadéquate : un étang artificiel de 65 mètres carrés, destiné à recevoir les rejets des 3 nouvelles stations d’épuration situées de l’autre côté de la propriété, va provoquer des tranchées à travers toute la zone de protection des arbres et mettre en péril trois magnifiques platanes.

Par ailleurs, le projet prévoit l’usage systématique de klinkers sur près de mille mètres carrés ; même avec des dalles végétalisées, la surface perméable sera fortement réduite ce qui va amplifier le phénomène de ruissellement le long du versant et risque, notamment, de provoquer un débordement de l’étang situé dans une zone déjà sujette à inondations et juste à 3 mètres des propriétés mitoyennes.

Revenons au chemin d’accès privé de 120 m. de long et de 3 m. de large qui fait l’objet de servitudes : aucun croisement de véhicules n’est possible ; la section pavée doit être sauvegardée ; ce chemin ne répond pas aux normes d’accès pour les pompiers, sans parler des engins de chantier. Même le bon sens semble faire défaut, la de- mande de permis ne mentionnant aucune de ces contraintes…

Et quand on regarde le projet architectural, on constate une absence d’intégration harmonieuse dans l’environnement bâti et paysager existant. Outre le gabarit disproportionné des nouvelles constructions par rapport aux propriétés avoisinantes, l’équilibre architectural de la villa est ruiné par sa transformation en un complexe de 3 appartements. Pourtant, vers 2010, l’école qui souhaitait légèrement en modifier l’aménagement intérieur, avait dû, tout de suite, abandonner son projet, l’architecte de la commune ayant, dès sa première visite, indiqué qu’il fallait absolument en préserver l’intégrité d’origine…

Quand on relit la Déclaration de politique générale de la Commune, de septembre 2018, on constate donc que ce projet est en totale contradiction avec les objectifs urbanistiques communaux. En voici quelques extraits :
• « Il s’agit de mettre en place un urbanisme de qualité et plus attractif pour encadrer la densification et préserver le caractère vert essentiel de notre Commune via un urbanisme raisonné, durable, qualitatif et respectueux des habitant(e)s, qui repose sur des balises claires, et ce pour des raisons de sécurité juridique et d’équité entre citoyen(ne)s.
• La Commune se montrera plus stricte par rapport aux demandes d’abattage d’arbres.
• La préservation des intérieurs d’îlots sera également poursuivie…La Commune n’autorisera pas de dérogations en intérieur d’îlot… sauf si celles- ci permettent d’améliorer significativement l’intégration du projet dans son cadre environnant.
• L’intrusion de l’automobile en intérieur d’îlot (bruit, pollution, lumière des phares) dans le cadre de nouveaux projets ne sera pas tolérée.
• La protection du patrimoine architectural est source de richesse, maintenant et pour les générations futures.
• Les choix communaux en matière de permis d’urbanisme favoriseront un juste équilibre entre la liberté architecturale et une bonne qualité du bâti assurant son intégration optimale dans l’environnement bâti, paysager et naturel. »

Il y a ici un abîme entre les promesses et les actes !

Quoi qu’il en soit, les riverains qui ont découvert cette situation nous ont fait part des mêmes ressentis :

• Une légitime impression que la préservation de l’environnement ne fait guère le poids face à l’appétit d’un promoteur (qui a pu longuement discuter de son projet à huis clos avec les ser- vices communaux).
• Un sentiment de profonde frustration de n’être pas consultés ni même informés sur un projet qui va avoir une forte répercussion sur leur cadre de vie (bien que la Déclaration communale se gargarise d’une « participation citoyenne et une démocratie locale »).
• Une incompréhension devant l’absence d’en- quête publique pour un projet qui requiert des dérogations, alors qu’il s’agit du cadre légal le plus approprié pour que les habitants puissent donner leur avis sur les enjeux écologiques et urbanistiques de ce programme immobilier.

La zone de protection des arbres du PPAS (pointillé blanc) chevauche une partie de la parcelle du Dieweg 57 (Périmetre en bleu). Il est prévu d’abattre les arbres devant les nouvelles constructions (rectangle jaune) alors qu’une quarantaine d’arbres ont déjà été abattus en 2022 dans la zone protégée (oval vert).

Au nom des riverains initiateurs de la pétition, qui, en 2 semaines, a recueilli le soutien de 200 habitants du quartier.

E. Fromentel
www.petitiondesblesdor.com
(Article écrit le 10 mars 2023)