Difficile de résumer ce débat qui s’est tenu le 30 juin à la
Maison de Arts à Uccle en présence d’une soixantaine de
personnes. Difficile parce qu’il s’agit d’une discussion au
cours de laquelle les questions et les réponses ont fusé de
manière un peu disparate et que des sujets différents se
sont parfois succédés.
Tentons cependant une synthèse,
même si elle est incomplète et imparfaite, en relevant
quelques points intéressants.
Pour rappel, le public était invité à poser des questions aux
3 invités intervenants : Olivier BASTIN, maître architecte de
la Région bruxelloise, Marc COOLS, échevin de l’urbanisme,
et Michel HUBERT, professeur à l’Université de St Louis,
directeur de Brussels Studies, et qui agissait en outre comme
modérateur.
Comme la nouvelle fonction de maître architecte n’est pas
encore bien connue, précisons qu’il s’agit de quelqu’un
nommé par le Gouvernement de la Région bruxelloise en
vue de garantir la qualité architecturale et paysagère des
projets immobiliers, en ayant une bonne compréhension
des enjeux et des besoins. Ajoutons d’emblée que nos
3 intervenants étaient en règle générale sur une même
longueur d’ondes, ce qui nous évite de devoir chaque fois
préciser qui a dit quoi !
Le titre du débat avait un côté intentionnellement
provocateur. Nos intervenants ont insisté sur la nécessité de
bien distinguer la spéculation foncière de la densification
de l’habitat. La densification est une nécessité dans une ville
en croissance, mais elle doit être adaptée aux particularités
locales. Si dans le centre de Bruxelles et en 1ère couronne
elle s’est réalisée assez naturellement, en seconde couronne
les situations sont beaucoup plus complexes : c’est ainsi
que, par exemple, la proposition de bâtir des immeubles–tours ne paraît pas indiquée à Uccle. A cet égard, on
observera que la majorité des logements récents sont de
gabarit moyen, même si les promoteurs immobiliers tentent
évidemment de rentabiliser au mieux leurs projets par des
constructions plus importantes.
Une certaine densification est également nécessaire si on
veut préserver des espaces verts.
Cette entrée en matière nous amène à l’aspect le
plus intéressant – et le plus réconfortant – du débat :
les 3 intervenants ont souligné l’importance qu’il y a à
entendre la parole des habitants. Et ceci, non pas quand
les projets sont déjà « ficelés », mais le plus possible en
amont. Actuellement, les procédures sont lourdes et surtout
organisées de telle manière que la participation citoyenne,
quand elle a lieu, vient généralement en fin de parcours.
Les études d’incidences durent parfois 3 à 4 ans, l’établissement
d’un Plan Particulier d’Affectation du Sol peut
prendre jusqu’à 6 ou 7 ans. Si la réaction des habitants vient
tardivement, il est quasi impensable de recommencer ces
procédures. Dès lors le pouvoir politique est tenté de laisser
passer certaines choses regrettables.
C’est un peu ce qui s’est passé il y a 4 ans lorsque l’ACQU,
aidée par IEB, a incité les habitants proches de la plaine
du Bourdon à faire savoir comment ils aimeraient voir
se transformer leur quartier ; les projets étaient déjà en
cours…
Ceci étant, une question reste non résolue et n’a d’ailleurs
été abordée qu’incidemment : comment les habitants
pourraient-ils se faire entendre sur des projets qui leur sont
inconnus ? Il est cependant vrai – et ceci a été dit – que les
projets émanant du pouvoir public sont vite connus, ce qui
permet une réaction rapide des habitants.
Dans une même perspective et toujours pour des projets
publics, Olivier Bastin et Marc Cools ont évoqué l’opportunité
de pouvoir étendre la réalisation de « contrats de
quartier » sous la forme de « contrats d’axe », à Uccle.
Un contrat de quartier est une procédure visant à revitaliser
une petite zone que le gouvernement bruxellois considère
comme défavorisée ; il n’y en a malheureusement pas sur le
territoire d’Uccle. Mais ce type d’action pourrait s’imaginer
à Uccle en visant un ensemble de quartiers qui souffrent de
problèmes spécifiques.
L’intérêt d’une telle dynamique est de permettre de faire
émerger la parole des habitants : l’étude du dossier de base
dure environ un an et intègre les remarques des uns et des
autres. En outre, elle permet une réflexion sur un ensemble
de quartiers, avec des lignes directrices souples.
L’échevin de l’urbanisme a rappelé que l’administration
communale a eu recours à cette dernière formule il y a
20 ans pour la rue de Stalle, ce qui s’est révélé bien utile
car la Commune a pu s’y référer quand des promoteurs ont
déposé des demandes de permis.
En mars dernier, elle a établi un Schéma de Développement
Calevoet – Moensberg, travail approfondi et d’excellente
qualité. On pourrait également songer à cet outil pour
développer plusieurs axes ucclois, notamment – c’est
l’exemple que l’échevin de l’urbanisme a cité – l’axe que
constitue la chaussée d’Alsemberg : réfléchir avec tous
les acteurs sur l’habitat, la mobilité, les équipements, le
développement économique, …
Mais encore faudrait-il que les documents concoctés au sein
de l’administration communale et éventuellement amendés
à la suite de remarques émanant d’habitants soient pris en
considération au niveau de l’administration régionale. En
effet, il faut savoir que depuis 2013 les communes n’ont
plus qu’un pouvoir d’avis pour les projets importants (quand
le demandeur est un pouvoir public, quand il s’agit d’un
projet d’intérêt régional, lorsqu’un projet est soumis à une
évaluation d’incidences, …) et que les décisions sont alors
prises au niveau de la Région. C’est ainsi qu’un permis
a été délivré pour une construction plaine de Bourdon
contre l’avis de la Commune. Bien plus, en matière d’urbanisme,
les communes ne sont pas toujours consultées par la
Région. Le projet actuellement discuté d’un Plan Régional
de Développement Durable en est un triste exemple.
La question des logements sociaux a été abordée. S’il
y a accord sur le fait qu’ils ne sont pas assez nombreux,
l’échevin de l’urbanisme a tempéré le constat en disant
qu’à Uccle ils sont majoritairement de taille plus importante
que dans les autres communes bruxelloises. Il a ajouté que quand on veut en construire, on se heurte souvent
à l’opposition des riverains qui préféreraient qu’on les
construise « ailleurs » !, réflexe nymbiste hélas bien connu.
Il a encore dit être bien conscient de ce qu’il faut éviter de
créer des cités de logements sociaux qui deviennent alors
des ghettos ; il est essentiel de mélanger le logement social
avec le logement moyen, de veiller à une mixité pour ne pas
marginaliser davantage des habitants moins favorisés en les
isolant des autres ; disséminer les logements sociaux permet
une mixité sociale ce qui peut éventuellement générer une
mixité d’activités ; c’est la politique suivie par les Agences
Immobilières Sociales.
D’autres sujets ont encore été évoqués, comme la
mobilité : problème qui ne pourrait être résolu que par un
changement dans le comportement des habitants ; même
sans densifier, la circulation est déjà un cauchemar ; et
encore la gestion de l’eau : comment remédier aux erreurs
du passé ; etc… , mais les 2 h. de débats ne permettaient
pas de les approfondir suffisamment.
Florence VANDEN EEDE et
Denys RYELANDT