Le 29 mars de cette année, le Collège a autorisé l’abattage en urgence d’un tilleul planté sur le trottoir à hauteur du n°104 de l’avenue Circulaire ; l’arbre avait été planté en 1950 et avait une circonférence de 170 cm.
Le permis d’abattage délivré par l’Urbanisme a été justifié parce qu’il se trouvait à front de voirie à l’endroit prévu pour accéder à un garage d’un immeuble d’habitation pour lequel un permis d’urbanisme avait déjà été délivré. L’urgence a été justifiée parce que « la période de nidification approchait » ; effectivement l’abattage des arbres est interdit en région bruxelloise du 1er avril au 15 août. L’autorisation s’est assortie d’une obligation de replantation 3 mètres plus à gauche, d’un tilleul en motte de 18/20 cm de circonférence.
Cet arbre faisait partie de l’alignement et de l’esthétique de l’avenue Circulaire ; un arbre jeune mettra des années avant d’atteindre le même port. Notons aussi, l’élagage important de son voisin, pour raison de chantier.
Examinons de plus près les raisons de cet abattage qui va à l’encontre de la politique affirmée de la Commune.
Un premier permis d’urbanisme a été délivré en 2017 pour construire une maison principale qui abrite un garage pour deux voitures, et deux logements à l’arrière qui bénéficient d’un carport accessible via un passage carrossable et piétonnier en façade latérale. L’avis de la Commission de Concertation souligne alors que cette solution permet de conserver les arbres d’alignement de l’avenue Circulaire.
S’en suivent plusieurs demandes de permis modificatifs qui changent le nombre de logements soit dans le bâtiment avant, soit dans le bâtiment arrière. Ce qui va évidemment de pair avec des modifications des accès carrossables. La dernière version est un parking en sous-sol dont l’accès se fait via un ascenseur à voiture. La Commune notifie sa décision favorable à cette dernière demande de permis modificatif le 4 juin 2021.
Le 1er mars 2022, une demande de permis d’abattage en urgence du tilleul est introduite. Elle est accordée le 29 mars et le 31 le tilleul est abattu.
Comment se fait-il que cette demande d’abattage n’ait pas été introduite avec le dernier PU modificatif ? Celle-ci doit pourtant contenir un « plan d’implantation » qui doit légalement reprendre tous les éléments importants de l’espace public dans un rayon de 50 mètres autour de la parcelle. Les arbres doivent y figurer, qui plus est un arbre important qu’on ne peut manquer de voir.
Le demandeur a ensuite introduit la demande d’abattage en invoquant l’urgence. Il lui aura donc fallu 9 mois pour se rendre compte qu’un arbre important devait être abattu !
C’est manifestement du saucissonnage, pratique contraire à la législation que connaissent bien les promoteurs.
Le service de l’Environnement a répondu qu’il n’avait pas eu d’autre choix que de donner un avis favorable à l’abattage en urgence de cet arbre dans la mesure où le service de l’Urbanisme avait déjà octroyé le permis modificatif pour l’immeuble.
Quant à la réponse de l’Urbanisme – seul habilité à octroyer le permis - :
« Le permis actuel est le 3ème dossier sur la parcelle. En effet le projet initial a subi des modifications dues aux erreurs de conception du projet précédent concernant la praticabilité de la rampe d’accès latérale de droite.
Un nouveau demandeur et un nouvel architecte ont donc été contraints de revoir le projet initial.
Toutefois, aucune des demandes instruites par le service de l’urbanisme ne sollicitait l’abattage de l’arbre en voirie.
La présence de l’arbre rendait l’accès à l’ascenseur pour voitures complexe, et aurait dès lors nécessité une modification de la zone de recul.
Dans les faits, nous le déplorons, le demandeur a introduit séparément une demande d’abattage auprès du service vert.
Nous devons tirer les leçons du résultat et mettre en place les procédures utiles afin que cette situation ne puisse se reproduire. »
Disons-le tout net, ces deux réponses nous laissent assez dubitatifs…
Tout d’abord, en quoi est-ce qu’un permis d’urbanisme modificatif octroyé ne donne pas d’autre choix que de remettre un avis favorable à l’abattage ? Il suffirait donc d’« oublier » dans sa demande de permis l’élément polémique pour obtenir gain de cause…..
Pourquoi ne pas avoir refusé l’abattage et demandé l’arrêt des travaux, ou la modification des plans ? A savoir, la longueur du trottoir pour cette adresse est de près de 18 mètres. Sur celle-ci, il devait bien avoir une solution alternative que d’abattre l’arbre, même si cela devait nécessiter une modification du projet. A ne pas faire d’exemple, cette pratique de « déjà construit, accepté » risque de continuer à se pratiquer en toute impunité.
D’autre part, en quoi est-ce qu’une éventuelle modification d’une zone de recul, comme l’indique l’urbanisme » pose problème ? Effectivement, si l’arbre (pour rappel, planté en 1950 et dont la circonférence est de 170cm…) a été oublié par l’architecte lors de la demande de modification du permis, c’est dommage pour le promoteur, mais ce n’est pas la responsabilité de la Commune…qui doit en revanche prendre action pour le « bien commun ».
Loin de nous de prétendre que les services communaux ne peuvent commettre d’erreurs, qu’ils doivent être parfaits. A leur décharge, précisons qu’ils manquent de personnel pour vérifier le caractère complet et exact de tous les dossiers, et de contrôleurs pour ensuite voir si les permis sont respectés lors de leur mise en œuvre.
Mais en l’espèce, on aurait pu « faire mieux ».
Il suffisait peut-être d’aller sur place pour voir qu’il était possible de faire passer une voiture sans abattre le tilleul, même si cela aurait sans doute nécessité le déplacement de l’ascenseur.
Non, en 2021 on accorde un permis qui ne comporte pas de demande d’abattage d’arbre (ce qui est cohérent avec l’avis émis en 2017 par la Commission de Concertation), puis en 2022 on explique qu’en raison de l’existence de ce permis il faut accorder un permis additionnel d’abattage !
Félicitations quand même pour le tour de passe – passe … !
En attendant, l’arbre n’est plus…
Et, à savoir, le 15 août, fin de la période d’interdiction d’abattage à Bruxelles, alors que c’est cet argument qui justifiait la demande en « urgence », le chantier est à l’arrêt depuis de longues semaines, rien ne s’est fait entre avril et fin août, rien n’est construit…
Il n’y avait donc AUCUNE URGENCE !