Manoir Pirenne, avenue de la Floride 125

Le massacre risque de continuer !!

Le Comité de quartier Floride-Langeveld s’est investi considérablement pour sauver le Manoir Pirenne et son remarquable parc. Il a obtenu, avec le concours actif de la CRMS, la sauvegarde comme site d’une moitié de la propriété et le maintien du Manoir. Il a recueilli plus de 500 signatures d’habitants pour préserver l’espace vert et la biodiversité. Aussi, lorsque le permis d’urbanisme a été accordé le 12 juillet 2022 et qu’est intervenu en janvier 2023, un abattage massif de 92 arbres, cela a provoqué la consternation de tout le quartier et bien au-delà, d’autant plus que 4 grands arbres indiqués expressément comme à conserver, ont également été abattus. Les vives réactions montrent bien que pour les habitants, il s’agit d’un écocide.

Mais l’affaire a continué !

En effet, le 5 juillet 2023, la Région a accordé un permis modificatif, affiché avenue de la Floride 125 :

  • Est prévu l’abattage de 23 arbres formant un alignement sur la limite droite du parc. Les motifs invoqués sont la présence de scolytes, des arbres secs, l’envahissement par le lierre et la sécurité en raison du risque de chute
    L’abattage d’épicéas et son remplacement par un alignement d’arbres plus appropriés n’a jamais été contesté par notre Comité et il est autorisé par le permis d’urbanisme du 12 juillet 2022. Un permis rectificatif n’est donc pas nécessaire pour ces 23 arbres.
  • Non prévu par le permis d’urbanisme initial car non demandé à l’époque, est accordé l’abattage supplémentaire de 5 arbres à front de l’avenue de la Floride, à l’entrée du parc, au motif que : « L’implantation des 5 arbres est incompatible avec le nouveau projet, une partie des houppiers empiètera sur la future villa et l’abattage facilitera la mise en œuvre du projet ».
  • Contrairement aux conditions du permis d’urbanisme initial, l’abattage d’une trentaine de saules blancs est également accordé L’endroit est partiellement en zone de protection d’arbres, proche du Manoir et partiellement en zone de protection d’un immeuble classé.
  • Est aussi accordée la régularisation de l’abattage non autorisé par le permis initial des 4 arbres, soi-disant abattus « involontairement » ou « accidentellement ».

Ceci suscite au minimum les réflexions suivantes :

  • Permis modificatif
    Le permis prétendument modificatif accordé par la Région est en réalité nouveau car il apporte des modifications significatives au permis d’urbanisme initial. Alors que les zones de protection d’arbres, la protection des intérieurs d’îlot, du maillage vert et de la biodiversité ont été au centre des débats, le permis modificatif autorise que de nombreux arbres supplémentaires soient abattus. Il ne s’agit pas de modifications mineures, mais de changements affectant le boisement et la biodiversité, et donc contraires aux objectifs européens de lutte climatique.
    Faut-il comprendre qu’il suffit à un promoteur d’introduire une demande de permis modificatif pour obtenir ce qui lui est refusé dans le permis initial ? Aussi, n’est-il pas pleinement justifié que l’administration impose une nouvelle enquête publique avec avis de la Commission des Monuments et Sites ? Il paraît assez évident que les demandes du promoteur seraient alors rejetées.
  • Les 5 arbres à front de rue
    Le prétexte invoqué pour abattre les 5 arbres à front de rue est inacceptable. Le promoteur est un professionnel ; il devait le savoir lors de l’introduction de la demande initiale.
    Allons-nous récompenser les omissions volontaires et trompeuses du promoteur ? Le maintien d’un front arboré à front de rue est un élément essentiel du permis initial.
  • Saulaie au nord
    Le permis modificatif reconnaît lui-même, l’intérêt écologique de la saulaie.
    « La saulaie présente une jeune population d’une trentaine de Salix Alba ; de croissance rapide, les sujets sont jeunes et tendent à chercher l’espace aérien en créant une nouvelle canopée ».
    Le permis octroyé par URBAN le 12 juillet 2022 précise (pages 2, 27 et 28) :
    « La Région demande de préciser le plan de la partie haute (potager) en marquant les arbres à conserver. »
    « Considérant que la zone initialement prévue pour la Villa 3 pourrait être densifiée en termes de plantations de nouveaux arbres pour renforcer une zone tampon avec les maisons du fond (proximité maison classée) »
    « S’agissant du développement immobilier du projet projeté sur la partie classée au n° 125, la CRMS estime que les gabarits et l’écriture architecturale des immeubles I et II ne respectent toujours pas la hiérarchie qui devrait exister entre le manoir, bâtisse principale du site, et les nouvelles constructions même si leur implantation et leur gabarit ont été légèrement ajustés. Le parti et le programme adoptés pour densifier les terrains n’ayant pas fondamentalement changé, cette opération immobilière mise insuffisamment sur la requalification patrimoniale et paysagère du lieu. La Commission n’y est donc pas favorable et estime que la zone de protection n’est pas traitée dans le respect du contexte paysager et de protection des perspectives vers et à partir d’un bien classé, tandis que c’est précisément son rôle. Elle n’est pas favorable au projet et estime que la zone de protection n’est pas traitée dans le respect du contexte paysager »
    Et pourtant, le permis modificatif accordé par la Région autorise « d’abattre 33 arbres pour créer une clairière. »
    A nouveau, c’est un changement majeur au permis d’urbanisme octroyé.
    Le nouveau permis aggrave lourdement l’écocide initial du permis de 2022 !
  • Abattage « accidentel ou involontaire » de 4 arbres.
    Les habitants ne sont pas à ce point naïfs pour croire que l’abattage est « accidentel ou involontaire. » Au contraire, ils sont ciblés.
    Pourquoi un promoteur se gênerait-il pour abattre indûment des arbres, dès lors que par la régularisation il ne sera pas sanctionné, sous le prétexte que c’est accidentel ?

Notre Comité estime que parler d’une régularisation du permis initial est une véritable fiction et qu’il s’agit en réalité d’un nouveau permis qui est irrégulier car il aurait dû, conformément aux dispositions expresses du COBAT, faire l’objet d’une nouvelle enquête publique avec consultation de la Commission Royale des Monuments et des Sites, s’agissant d’un nouvel aménagement d’une propriété de plus de 5.000m2.

Sachant que la Commune peut exercer un recours contre le permis délivré par la Région devant le Collège d’urbanisme, nous avons demandé à la Commune d’exercer un tel recours pour :

  • Que soit exigé du promoteur qu’il respecte strictement le permis d’urbanisme, sans nouvelles dérogations ni modifications, et que les pouvoirs publics y veillent ;
  • Si elle est maintenue, que la demande de permis modificatif soit soumise à enquête publique et à l’avis de CMRMS. Et qu’elle soit considérée comme ce qu’elle est : du « saucissonnage » ;
  • Dans le cadre de la crise climatique et conformément aux objectifs fixés dans les différents plans verts des différents niveaux de pouvoir, que soit refusé totalement l’abattage des 38 arbres (33 + 5) demandé par le promoteur ;
  • Que le promoteur soit sanctionné pour l’abattage illicite des 4 arbres et qu’il soit obligé de replanter des arbres de grande dimension. Est-il normal d’octroyer un permis additionnel alors que le précédent n’a pas été respecté. Le refus pourrait être la sanction. Il est évident que les replantations ne remplacent jamais les arbres abattus.
  • Que des arbres soient replantés dans la zone des anciennes serres, afin de compenser les atteintes aux zones de protection d’arbres.

Il faut être bien conscient que l’abattage massif a provoqué un tollé dans le quartier et que l’abattage d’arbres supplémentaires ne ferait qu’augmenter le fossé entre les citoyens et les pouvoirs publics.

Chantal de Brauwere
Pour le comité de quartier Floride - Langeveld
30 avril 2024